Souveraineté minière : le Ghana centralise le commerce de l’or

Accra vient d'étendre son contrôle sur le commerce de l’or, dans le but de lutter contre la contrebande et de renforcer les réserves en devises. Une nouvelle étape dans la stratégie nationale visant à faire de l’or un levier de stabilité et de souveraineté économiques.
Le gouvernement ghanéen vient de franchir une nouvelle étape dans sa stratégie de souveraineté économique en renforçant son contrôle sur le commerce de l’or. Premier producteur du précieux métal sur le continent, le Ghana fait face à une érosion de ses recettes en devises et à une pression constante sur sa monnaie nationale, le cedi.
Pour enrayer cette spirale, les autorités ont décidé d’étendre les prérogatives de la Ghana Gold Marketing Company (GoldBod), entité publique désormais en charge de la centralisation des ventes d’or du pays. Parallèlement, le gouvernement a conclu des accords avec neuf sociétés minières pour acheter 20 % de leur production d’or, renforçant ainsi son programme stratégique d’achat d’or.
Auparavant, le gouvernement ghanéen avait ordonné à toutes les entités étrangères de quitter le marché local de l’or en fixant comme date butoir le 30 avril 2025. Début mars, le gouverneur de la banque centrale avait suspendu le programme d’échange d’or contre du pétrole du pays (« gold-for-oil »), prévoyant que le cedi se stabiliserait après cette décision.
L’élargissement du contrôle de l’État sur l’or s’inscrit dans la continuité de cette approche pragmatique. Le recentrage vise à limiter la contrebande, particulièrement répandue dans le secteur artisanal, et à garantir que les revenus de l’or transitent bien par les circuits officiels.
À travers cette reprise en main, le Ghana tente aussi de tirer les leçons de décennies de libéralisation inégale, qui ont souvent profité davantage aux multinationales qu’aux économies locales. L’or du Ghana n’est plus seulement une matière précieuse : il devient un instrument de souveraineté.
Souverainetés minières africaines
D’autres pays africains ont récemment pris des mesures similaires. Le Zimbabwe a créé une société d’État chargée de centraliser ses exportations d’or. En RDC, des projets de renégociation des contrats miniers sont en cours, avec une volonté affichée d’augmenter la part des revenus revenant à l’État. Même son de cloche au Sénégal, sous l’impulsion du tandem Faye-Sonko, mais aussi dans les pays de l’AES (Mali, Burkina Faso, Niger) qui s’orientent vers une plus grande nationalisation de leurs ressources minières.
Ces démarches, loin d’être anecdotiques, traduisent une dynamique plus large de réappropriation des ressources naturelles en Afrique. Fatigués d’un modèle extractif centré sur les rentes à court terme et sur une dépendance aux capitaux étrangers, plusieurs États africains cherchent à redéfinir les termes de leur souveraineté économique.
La montée de jeunes dirigeants souverainistes, le retour de discours panafricanistes et l’essor de partenaires non occidentaux respectueux de la souveraineté comme la Russie ou la Chine favorisent cette tendance.