Etats-Unis : des élus du Wyoming veulent bannir les voitures électriques de leur Etat d'ici à 2035
Invoquant, entre autres, la défense de l'emploi, plusieurs élus de cet Etat pétrolier proposent d'interdire la vente de nouveaux véhicules électriques en 2035, date à laquelle l'Europe est censée se débarrasser des voitures thermiques.
Cette proposition, à rebours du mouvement général à l'œuvre dans le secteur automobile, qui opère sur les différents continents un virage vers l'électrique, nous vient des Etats-Unis. Comme l'a relevé L'Opinion, des parlementaires républicains de l'Etat du Wyoming, parmi lesquels figure le président du Sénat de l’Etat, Dan Dockstader, ont déposé le 13 janvier un texte législatif proposant de bannir les voitures électriques d'ici à 2035.
Les élus y soulignent que l'industrie pétrolière et gazière de l'Etat, «fière et valeureuse», a «créé un nombre infini d’emplois» : ces derniers pourraient être menacés par une conversion du parc automobile à l'électrique, qui leur semble impraticable étant donné la superficie du Wyoming, l’un des dix plus grands Etats du pays. L'étalement du réseau routier, ainsi que le nombre de bornes de recharge qu'il faudrait déployer, feraient ainsi obstacle à un usage généralisé des véhicules électriques.
Prétendue crise climatique
«Si vous n’aimez pas nos voitures à essence, nous n’aimons pas vos voitures électriques», a lancé Jim Anderson, l'un des sénateurs républicains à l'initiative du texte, dans le Cowboy State Daily, le quotidien local. «Je tiens à m’assurer que les solutions que certains souhaitent apporter à la prétendue crise climatique sont réellement praticables dans la vie réelle. Je n’apprécie tout simplement pas que d’autres Etats essaient d’imposer une technologie qui n’est pas prête», a complété Brian Bonner, cosignataire de la proposition.
Les parlementaires listent d'ailleurs dans leur proposition une série de difficultés liées à la production massive de véhicules électriques, dont de forts besoins en métaux rares, sans oublier la problématique du recyclage des batteries de ces voitures, qui demanderait d'importants efforts d'adaptation. Ils soulignent que des quantités «massives» d'électricité seraient nécessaires pour accompagner «la mésaventure des véhicules électriques», et estiment qu'il existe bien d'autres priorités, dont celle de garder les métaux rares pour des «objectifs vitaux» de la nation américaine.
A ce titre, les élus suggèrent donc de limiter dans un premier temps la vente de ces véhicules, avant de l'interdire complètement en 2035, leur proposition prenant le contre-pied de la politique du président démocrate Joe Biden. Ce dernier a en effet décidé de soutenir massivement le développement de la production de véhicules électriques, notamment via la loi sur la réduction de l'inflation (Inflation Reduction Act), votée fin août, qui prévoit des aides aux ménages pour l'achat de véhicules électriques neufs, ainsi que des crédits d'impôt pour les investissements dans la filière.
L'Europe parée pour le virage vers le tout-électrique ?
Ces larges aides publiques ont suscité l'inquiétude de l’UE, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen fustigeant, lors du sommet de Davos le 17 janvier, des «tentatives agressives» visant à attirer les capacités industrielles de l'Europe, en ciblant à la fois la Chine et les Etats-Unis. Selon la dirigeante, les aides publiques de ces deux pays à leurs constructeurs aboutiraient à une situation dans laquelle «le commerce n'est pas équitable», Bruxelles étant de longue date opposée aux aides d'Etat.
A l'inverse des élus du Wyoming, l'année 2035 est l'horizon qu'a fixé l'UE pour bannir les véhicules thermiques, un choix industriel majeur qui ne fait pas l’unanimité sur le Vieux Continent, y compris parmi ses plus hauts responsables. Dans une interview aux Echos début novembre, le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton a ainsi émis des réserves sur la possibilité de respecter cette échéance, estimant que la conversion de l’ensemble des chaînes de production automobile représentait «la plus forte transformation industrielle qu'ait connue l'Union européenne».
«Le passage à l’électrique détruira 600 000 postes», avait alors estimé l’ancien ministre français de l’Economie, tout en proposant une «clause de revoyure» en 2026 pour éventuellement décider d’un report de l’échéance de 2035.
Thierry Breton avait, à l'instar des élus républicains du Wyoming, mis en exergue les besoins exponentiels en matières premières critiques que nécessiterait la conversion au tout-électrique, estimant qu'il faudrait augmenter de 15% la production d'électricité d'ici à 2050 pour alimenter un parc automobile complètement transformé.