Crise énergétique et inflation : «Il y a une spéculation infernale» des traders, selon Bruno Bernard
Intervenant sur RT France au sujet de la crise énergétique et de l'inflation galopante, l'économiste Bruno Bernard est revenu sur les différentes propositions européennes et françaises pour aider le consommateur, qu'il juge sans réelle efficacité.
Face à la flambée des prix de l’énergie, en particulier du gaz sur les marchés européens, l’exécutif a annoncé le prolongement du bouclier tarifaire pour «limiter» à 15% les hausses de prix. Bruno Bernard, économiste, expert en commerce international, est intervenu sur RT France le 14 septembre pour faire le point.
Commentant l’annonce d’une future régression de l’inflation, en laquelle le gouvernement a confiance, Bruno Bernard souligne qu’en comparant les prix «du blé ou du pétrole par rapport à l’année dernière […], il faut savoir qu’il y a beaucoup de traders qui font beaucoup d’argent ; les prix n’ont pas tellement augmenté sur le marché, mais les prix à la vente, au détail ont augmenté». «Ça veut dire qu’il y a une spéculation infernale en ce moment », estime à ce titre l’économiste, aussi bien pour les matériaux de constructions que pour les denrées alimentaires. «Ce sont les traders qui font la loi et mettent en danger l’économie mondiale», a-t-il renchéri.
Concernant le plafonnement des revenus des producteurs d'électricité proposé par la Commission européenne, laquelle tablerait sur un gain de 140 milliards d’euros pour l’UE, Bruno Bernard rappelle que si «les taxes sont payées à l’Union européenne, elles ne sont pas redistribuées au consommateur». Qualifiant la mesure de «non-sens», il a également mis en lumière l’ambiguïté de l’UE au sujet de l’Azerbaïdjan qui lui fournit du gaz «alors que ce pays est en conflit avec l’Arménie». «Pour sécuriser 10% de l’apport de gaz de l’Union européenne, celle-ci a renié les droits de l’Homme en Azerbaïdjan et en Arménie», a ainsi souligné Bruno Bernard.
L’économiste a également épinglé l’ambivalence économique de l’Union européenne qui se trouve derrière ces mesures. «Si on est dans une économie dirigée par les politiques, il faut chercher du gaz à Chypre et le sortir plutôt que d’importer du gaz de schiste qui vient de très de loin, des Etats-Unis. […] Si on est dans une économie de marché, on ne peut pas taxer les profits des compagnies et si on est dans une économie dirigée, il faut qu’elle soit dirigée autrement», a-t-il développé.
Le chèque énergétique proposé par le gouvernement : «des confettis dans les cheveux», selon Bruno Bernard
Quant aux mesures annoncées par le gouvernement français, tels que les chèques énergétiques évoqués par Elisabeth Borne d’un montant de 100 à 200 euros qui concerneraient 12 millions de foyers, Bruno Bernard s’est interrogé sur l’efficacité d’un tel dispositif. «Est-ce que ce n’est pas des confettis dans les cheveux, comme le dirait la chanson ? Dans le sens où si on propose des chèques éco à 12 millions de personnes, il faut savoir que les autres 50 millions de personnes vont devoir banquer, parce qu’il y a bien quelqu’un qui doit payer, et ce sont toujours les mêmes qui payent et toujours les mêmes qui sont épargnés», a-t-il avancé. Par ailleurs, le chèque énergétique proposé par l’exécutif ne permettrait pas de compenser l’inflation ou la hausse des prix, toujours selon l’économiste, mais au contraire creuserait plus les écarts de richesses.
«Quand il y a une inflation, l’Etat gagne beaucoup d’argent sur la TVA, puisque les prix augmentent, la TVA augmente et donc l’Etat fait des superprofits. Vous ne pouvez pas faire de superprofits quand les supermarchés vous vendent des produits de première nécessité de base plus chers pour donner un petit chèque à des consommateurs qui sont au bord de la rupture», a encore ajouté Bruno Bernard.