Plastique dans les cantines : le gouvernement cède aux lobbys
Sous la pression des industriels, un projet de décret déposé en février 2025 propose de réautoriser les couverts et la vaisselle en plastique dans les cantines scolaires, revenant sur l’interdiction prévue par les lois EGalim et antigaspillage.
«Plastiques dans les cantines, la France remet le couvert […] 7 ans après le vote de la loi [...] Un projet de décret vient édulcorer l’efficacité de la loi Egalim pour ce qui concerne l’utilisation des plastiques dans la restauration scolaire». Sur le réseau social Facebook l’association Cantine sans Plastique France s’inquiète du retour du plastique dans les cantines.
Pour l’association, «rien ne justifie ce retour en arrière législatif» alors que le plastique pourrait bientôt faire son grand retour dans les cantines scolaires du pays. Le 20 février 2025, le gouvernement a discrètement soumis à consultation publique un projet de décret qui assouplit les interdictions instaurées par la loi EGalim de 2018 et la loi antigaspillage de 2020. Ces textes prévoyaient, dès le 1er janvier 2025, la suppression des «contenants alimentaires» en plastique – incluant couverts, assiettes et gobelets – dans la restauration collective, des crèches aux universités. Mais sous la pression des lobbys de la plasturgie, le ministère de la Transition écologique propose désormais d’exclure la vaisselle et les couverts de cette interdiction.
Une vague de protestation
La consultation, ouverte jusqu’au 14 mars, a déjà suscité une vague de protestations. Près de 1 500 commentaires, qualifiant le texte d’«hérésie» ou de «rétropédalage inacceptable», ont été déposés en quelques jours. Parents, associations environnementales et médecins dénoncent un «grand pas en arrière» pour la santé des enfants et l’écologie. L’Association santé environnement France (ASEF) met en garde contre les perturbateurs endocriniens présents dans le plastique, liés à des troubles comme la puberté précoce, l’obésité ou certains cancers. «Un simple contact, aussi bref soit-il, peut entraîner un passage des particules plastiques du contenant à la nourriture servie à nos enfants», alerte l’ASEF.
Ce revirement intervient dans un contexte où les alternatives – verre trempé, inox, céramique – sont déjà adoptées par de nombreuses cantines. Pourtant, le lobby Plastalliance, fort de succès comme l’annulation de l’interdiction des emballages plastiques pour fruits et légumes, semble avoir pesé lourd. Le secrétaire général de ce lobby Joseph Tayefeh se félicitait en septembre d’une décision européenne en faveur de l’usage du plasique: «Le plastique bashing réglementaire a commencé en France, il est enterré à Bruxelles. Merci à la Commission européenne».
Le ministère argue d’une «faiblesse juridique», affirmant que les couverts ne sont pas des «contenants» au sens strict, et préfère céder plutôt que risquer une invalidation totale du décret.
Faute de données précises sur l’usage du plastique dans les 80 000 lieux de restauration collective, le débat s’enflamme. Pour beaucoup, ce décret illustre une capitulation face aux industriels, au détriment de la santé publique et des engagements écologiques.