Gilets jaunes, acte 2 : chiffres, profil des manifestants... La version de Castaner contestée
Une semaine après leur première journée de mobilisation, les Gilets jaunes ont remis le couvert, notamment avec un appel à converger sur Paris dimanche. Le bilan de cette journée établi par l'exécutif a laissé plus d'un commentateur pantois.
Ce 24 novembre, ce sont 106 301 manifestants qui étaient réunis à travers toute la France, selon Christophe Castaner. Par ailleurs, alors que la journée de mobilisation a été entre autres marquée par des affrontements et d'impressionnants dégâts matériels, notamment sur les Champs-Elysées, le ministre de l'Intérieur n'a pas manqué de jeter la pierre sur l'ultradroite. «Les séditieux ont répondu à l'appel de Marine Le Pen» a-t-il affirmé face aux journalistes. Des propos auxquels la principale intéressée a répondu à l'antenne de RT France.
On voudrait faire croire que c'est une manifestation d'extrême-droite, c'est la mobilisation du peuple lui-même.
«L'appel de Marine Le Pen» évoqué par Christophe Castaner apparaît peu crédible au vu des encouragements explicites au mouvement des Gilets jaunes exprimés par le chef des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon : «On voudrait faire croire que c'est une manifestation d'extrême-droite [...] c'est la mobilisation du peuple lui-même» a-t-il affirmé dans une vidéo publiée sur son compte Facebook officiel.
«J’aimerais qu'on oublie pas l'écrasante majorité de ceux qui veulent exprimer leur colère d’être écrasés par la politique anti-ouvrière de ce gouvernement [...] Je ne crois quand même pas que le Font national soit banderole déployée sur les Champs», a également réagi sur l'antenne de RT France Nathalie Artaud, la porte-parole de Lutte ouvrière.
#Giletsjaunes : «Ils se battent pour pouvoir vivre dignement» estime @n_arthaud#RTFrance en direct :
— RT France (@RTenfrancais) 24 novembre 2018
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Tant au niveau de la précision des chiffres annoncés que du portrait politique des «séditieux» tiré par Christophe Castaner, sa version peine à convaincre.
Des chiffres émanant d'une seule source
De fait, certaines images diffusées sur les réseaux sociaux tendent à dépeindre un tableau sensiblement différent de celui présenté par l'exécutif.
Vous avez vu comme elle est maline, l'ultradroite ?
Jean-Christophe Buisson, directeur du Figaro Magazine, s'est ainsi interrogé à travers un tweet sur l'identité politique des personnes présentes ce 24 novembre sur les Champs-Elysées. Ironisant sur l'habileté de l'ultradroite – et implicitement sur celle de Christophe Castaner – le journaliste a rappelé, images à l'appui, que des slogans d'ultragauche étaient visibles sur le mobilier urbain, et que par ailleurs, un gilet jaune n'avait pas manqué de brandir, pour l'occasion, un drapeau du Che Guevara. «Vous avez vu comme elle est maline, l'ultradroite ?» a-t-il commenté.
Vous avez vu comme elle est maline, l'ultradroite ? Elle brandit des drapeaux Che Guevara et tague des slogans d'ultragauche pour ne pas se faire repérer. Mais le fin#Castaner ne s'est pas laissé berner, lui...#GiletsJaunes#24novembre#ChampsElyseespic.twitter.com/qFePB7i1T9
— J-Christophe Buisson (@jchribuisson) 24 novembre 2018
Laure Cometti, journaliste pour le quotidien 20 minutes, a pour sa part relevé un graffiti de la mouvance anarchiste, courant de philosophie politiquement opposé à l'ultradoite. Des inscriptions du même type ont été constatées sur l'avenue des Champs-Elysées, notamment sur l'auvent en flammes de l'hôtel Marriott.
Slogans #24novembre#giletsjaunes#ChampsElyseespic.twitter.com/WqsZwsnm6z
— Laure Cometti (@la_comete) 24 novembre 2018
🔺️DIRECT INFO🔻terrasse Marriott en feu ! #giletsjaunes#24novembre#ChampsElyséespic.twitter.com/PVcXeutPRO
— HORS-ZONE Press ⚠️ (@HZ_Press) 24 novembre 2018
Est-ce qu'on essaie pas de minimiser les chiffres ?
Quant au chiffre annoncé, tout comme celui de la mobilisation du 17 novembre, il ne semble pas très convaincant. Le soir de la mobilisation, même le journaliste de BFMTV, Dominique Rizet, s'est interrogé sur les intentions du gouvernement, au vu des images, notamment des Champs-Elysées, diffusées par sa chaîne. «Est-ce qu'on n'essaie pas de minimiser les chiffres ? [...] C'est une question qu'on peut se poser, ça s'est déjà produit par le passé», a-t-il commenté, avant d'ajouter : «Si un jour les Gilets jaunes se fédèrent, on aura peut-être une autre version des chiffres.» Il faisait ainsi référence au fait qu'à l'inverse des manifestations organisées par les syndicats, il n'y avait qu'un seul son de cloche concernant les Gilets jaunes, en l'occurrence celui de la police.
Traduisant la méfiance qui prévaut face à ces chiffres sur les réseaux sociaux, l'essayiste et blogueuse Coralie Delaume a ironisé sur un comptage «à l'unité près». «Je m'en remets pas» a-t-elle ajouté.
Ahahahahah ! 106301 manifestants ! Genre, ils sont capables de les compter à l'unité près ! Je m'en remets pas 🤣 https://t.co/2QryzIjg0X
— Coralie Delaume (@CoralieDelaume) 24 novembre 2018