Processus de Kimberley : la Russie met en garde contre une déstabilisation du marché du diamant
Alors que s’ouvre ce 12 novembre la session plénière du Processus de Kimberley, Moscou a dénoncé la politisation de l'agenda du forum par les pays occidentaux et mis en garde contre les conséquences de leurs sanctions contre les diamants russes, soulignant leurs impacts négatifs sur l’ensemble de la filière.
La session plénière du Processus de Kimberley, qui s’ouvre ce 12 novembre, est attendue avec impatience par la majorité des acteurs du marché des diamants.
Après l’échec de l’édition précédente, où aucun communiqué final n'avait pu être adopté, le vice-ministre russe des Finances, Alexeï Moïseïev, a déclaré espérer que l’industrie puisse éviter une impasse une fois de plus. Le vice-ministre russe accuse les pays occidentaux de « politiser » l’agenda du Processus de Kimberley en introduisant la question du conflit en Ukraine, ce qui, selon Moscou, empêche un dialogue logique et constructif.
Dans un communiqué, publié le 11 novembre sur le site du ministère russe des Finances, en amont de cette plénière, Moïseïev a critiqué les tentatives des pays occidentaux d’imposer des restrictions sur les diamants russes, estimant que celles-ci allaient nuire à l'ensemble du secteur. « Malheureusement, les tentatives de politisation risquent de déstabiliser le marché mondial du diamant », a-t-il mis en garde.
Afflux des pierres synthétiques et risque d'émergence d'un « marché parallèle »
Le vice-ministre russe des Finances a souligné que le retrait de pierres naturelles pourrait pousser les acteurs de l’industrie à se tourner vers des diamants synthétiques, un remplacement qui affecterait non seulement la Russie, mais aussi l’ensemble des producteurs et revendeurs de diamants naturels.
Selon Alexeï Moïseïev, les sanctions des pays du G7 visant actuellement les diamants russes menacent d'entraîner une pénurie de pierres naturelles sur le marché mondial au profit des diamants de synthèse. « Un afflux de pierres synthétiques pourrait provoquer un effondrement des prix pour les diamants naturels, menaçant la pérennité de l’industrie traditionnelle », a-t-il souligné.
Celui-ci a également qualifié de « fausse » la thèse « selon laquelle ces restrictions permettront de vendre des pierres "certifiées G7" à des prix plus élevés ».
« Au contraire, des charges supplémentaires conduiront à l'émergence d'un vaste marché parallèle tout au long de la chaîne d'approvisionnement, porteront atteinte au commerce légitime, au niveau de transparence durement acquis au cours des travaux du système de certification KP », a-t-il prévenu.
Un appel à renforcer le Processus de Kimberley face aux nouveaux mécanismes de surveillance
Parallèlement, M. Daniel Mackaire Eloung Nna, ingénieur des mines et géologie et secrétaire national permanent du Processus de Kimberley pour le Cameroun, a fait part de ses préoccupations au sujet de l’émergence de nouveaux mécanismes alternatifs visant à surveiller le commerce des diamants. Selon lui, ces dispositifs cherchent à affaiblir la crédibilité et la pertinence du Processus de Kimberley, en intervenant davantage sur des questions géopolitiques que sur les défis réels du secteur diamantifère. « Ces mécanismes alternatifs n’apportent pas de réponses aux défis du secteur, mais exacerbent le commerce international des diamants bruts », a-t-il déclaré.
Pour Eloung Nna, le Processus de Kimberley doit être renforcé car il demeure un outil unique garantissant que les ressources diamantifères ne deviennent plus jamais source de conflits et de souffrances. « Le PK symbolise la détermination de la communauté internationale à veiller collectivement à ce que plus jamais des ressources telles que les diamants ne soient source de douleur pour l'humanité », a-t-il ajouté.
Moscou plaide pour un « cadre de travail au service de l'industrie »
La Russie, l’un des principaux exportateurs mondiaux de diamants bruts, considère que les sanctions visent injustement son industrie minière. Alexeï Moïseïev a insisté sur l’importance de cette filière pour les économies africaines et pour la Russie, des acteurs clés de l’extraction mondiale de diamants. « Ce sont les producteurs et les revendeurs de diamants naturels qui en subiront les conséquences », a-t-il prévenu, rappelant que les sanctions européennes ont déjà fragilisé le secteur.
En prévision de cette session, la Russie espère le soutien des Émirats arabes unis, qui président le forum lors de cette plénière, pour revenir à un dialogue davantage axé sur les enjeux industriels. « Nous comptons sur une approche équilibrée des Émirats et sur leur rôle de centre mondial du commerce du diamant pour ramener le PK à un cadre de travail au service de l'industrie », a déclaré Moïseïev.
Marché du diamant : les prix en chute libre
L’année dernière, les sanctions de l'Union européenne visant les diamants russes ont renforcé la pression sur le secteur. Avec des mesures restrictives imposées en début d'année, l'UE a visé à limiter les exportations russes de diamants bruts, un mouvement qui a exacerbé la crise du marché.
En effet, selon le Rapaport Diamond Report, le marché du diamant a connu une chute de prix historique, certains types de diamants ayant perdu jusqu’à 28 % de leur valeur depuis le début de l'année.
Les raisons de cette chute sont multiples : en plus de la surabondance de l’offre due aux exportations indiennes, une baisse d’intérêt pour les diamants naturels est observée parmi les jeunes générations, qui se tournent de plus en plus vers des pierres synthétiques.
Les experts financiers notent que les diamants naturels attirent moins d’investisseurs, notamment dans un contexte de ralentissement économique aux États-Unis et en Chine, les plus grands acheteurs sur ce marché.