Karine Bechet, docteur en droit public (France), présidente de l'association Comitas Gentium France-Russie, animatrice du site Russie Politics.

Trump-Poutine à Budapest ? La «paix» en trompe-l’œil

Trump-Poutine à Budapest ? La «paix» en trompe-l’œil Source: Gettyimages.ru
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Annoncée comme un tournant diplomatique, la rencontre Trump-Poutine à Budapest semble prendre du plomb dans l’aile avant même son envol. Pour Karine Bechet, l’objectif de Donald Trump n’est pas la paix, mais la reddition géopolitique de la Russie au profit des Globalistes.

Tous les partisans de la « globalisation revisitée » à la sauce Trump s’emballaient sans retenue après l’appel téléphonique entre les présidents Poutine et Trump le 16 octobre dernier, annoncé comme devant déboucher sur une rencontre bilatérale à Budapest.

Ainsi, après la visite de Poutine aux États-Unis, il n’était finalement plus question pour le président américain de rendre sa visite en Russie, comme pourtant le protocole l’exigerait. Budapest était une solution du moindre mal, symbolique, mais pas trop, tout en abaissant sérieusement le niveau pour les Américains, puisque le principe du parallélisme était frontalement rompu. Les Globalistes entendent éviter à tout prix de voir Trump en Russie, alors que la Russie n’est pas prête à capituler.

De leur côté, les dirigeants européens, comme à chaque fois, montent la garde... et le ton pour obtenir une place à la table des négociations. Ils ne comprennent toujours pas — ou feignent, pour sauver la face, de ne pas comprendre — que le personnel de service n’est jamais appelé au dîner. Leur rôle est strictement limité à l’achat d’armes américaines pour le front et à l’approvisionnement de l’armée atlantico-ukrainienne. À leurs frais, bien sûr.

Il faut dire que le « plan de Trump » est assez simple, pour ne pas dire primitif : « Nous pensons qu’ils doivent juste s’arrêter à la ligne de front actuelle, rentrer chez eux, arrêter de tuer des gens et en terminer », a-t-il déclaré à bord de son avion par la suite.

Il s’agit in fine d’un cessez-le-feu général, sans surtout régler les sources du conflit. Pour Trump, les seules parties au conflit sont l’Ukraine (conçue ici comme un grand pays souverain) et la Russie. Les pays de l’OTAN sont absents de l’équation et les États-Unis sont évidemment le pays arbitre. Autrement dit, les véritables responsables du conflit se blanchissent par l’intermédiaire de Trump.

Cette approche doit donner du temps aux Globalistes pour se refaire des forces et remettre le front ukrainien en état. D’ailleurs, comme le déclare Sergueï Narychkine, le directeur du Service russe de renseignement extérieur, les alliés européens de l’OTAN se préparent à une guerre contre la Russie ; le processus d'augmentation exponentielle de la production militaro-industrielle européenne a commencé.

Il est évident que, dans la configuration actuelle du conflit, la seule possibilité pour les Globalistes de ne pas perdre et de reprendre la main est un gel du conflit. Cette période de suspension des hostilités peut alors être utilisée pour modifier la configuration des forces en jeu, que ce soit par le renforcement de la production militaire, le reformatage des populations européennes pour les préparer à un conflit direct avec la Russie ou la diversification du front. Chaque élément n’est pas exclusif des autres.

De son côté, la Russie a rappelé que ses conditions n’avaient en rien changé. Elle cherche évidemment à régler les sources du conflit et, si les autorités russes sont toujours prêtes à négocier lorsque cela a un sens, elles ne modifient en rien leur position, car cela porterait atteinte à leur sécurité nationale.

Un gel du conflit ne l’intéresse pas, et cela explique certainement pourquoi Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, est si prudent. Le 20 octobre, donc quatre jours après l’annonce de la possible rencontre de Budapest « dans les deux semaines », toujours rien de concret à l’horizon : « La position de la Russie sur un gel de la ligne de front demeure inchangée (...). Le travail des équipes russe et américaine sur la préparation du sommet entre Poutine et Trump à Budapest n’a pas encore commencé. »

Ces déclarations ont été suivies d’un appel téléphonique entre le secrétaire d’État américain Rubio et le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov, qui n’a pas débouché sur l’organisation d’une rencontre entre les équipes russe et américaine chargées de préparer la réunion de Budapest.

Le vice-ministre des Affaires étrangères Ryabkov est d’ailleurs très distant, voire moqueur, sur la question : « On ne peut pas reporter ce dont on n’a pas convenu. Nous n’avons pas confirmé ce que certains médias occidentaux ont écrit hier. Nous étions loin d’avoir une idée des dates et du lieu d’un tel échange. »

Dans la foulée, CNN remet même en cause la proximité de la rencontre entre Trump et Poutine à Budapest : « Les espoirs du président Donald Trump d'une rencontre rapide avec le président russe Vladimir Poutine pourraient être déçus, après que des sources proches du dossier ont déclaré à CNN qu'une réunion préliminaire attendue entre les principaux conseillers aux affaires étrangères des dirigeants mondiaux cette semaine avait été reportée, du moins pour l'instant. » CNN souligne qu’il semblerait que les positions de la Russie et des États-Unis concernant le règlement du conflit en Ukraine soient trop éloignées l’une de l’autre.

Aujourd’hui, effectivement, il n’y a pas de compromis possible. Les Globalistes ont besoin de stopper l’armée russe, qui avance sur le front, et de gagner du temps pour reprendre le conflit en position de force, lorsque le moment leur sera profitable, comme ce fut le cas en Syrie.

Rappelons tout d’abord que les territoires intégrés constitutionnellement à la Fédération de Russie vont au-delà du Donbass. Par ailleurs, la Russie a besoin d’éliminer la menace existante à ses frontières afin de pouvoir garantir sa sécurité. Elle n’a donc pas besoin d’un cessez-le-feu, mais d’un accord qui permettrait de réduire à néant l’ennemi.

Or, l’Ukraine est le front, elle n’est pas le sujet du conflit. Les élites globalistes, avec à leur tête les États-Unis, le bras armé de l’OTAN et les satellites européens, sont le véritable sujet de ce conflit. Et ils n’ont strictement aucune raison de se suicider, de disparaître et d’offrir la victoire sur un plateau à la Russie.


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