Les paiements transfrontaliers en Afrique devraient se hisser à 1 000 milliards de dollars à l’horizon 2035

L'Afrique devrait réaliser une croissance rapide en matière de paiements transfrontaliers durant la prochaine décennie. Si l’innovation numérique de paiements rencontre un succès de plus en plus prononcé auprès des utilisateurs grâce à des coûts intéressants, le secteur rencontre tout de même des inefficacités systémiques et des défis législatifs.
Un nouveau rapport publié le 27 mai par la société de capital-risque axée sur l’Afrique, Oui Capital, le marché africain des paiements transfrontaliers devrait atteindre les 1 000 milliards de dollars à l’horizon 2035.
D’après le rapport, intitulé « Paysage des paiements transfrontaliers en Afrique : une analyse approfondie des systèmes, des acteurs et des évolutions qui façonnent les flux de paiements transfrontaliers en Afrique », le marché du continent est évalué actuellement à 329 milliards de dollars avec un taux de croissance annuel de 12 %. À cette cadence, le chiffre de 1 000 milliards de dollars devrait être réalisé au bout de la prochaine décennie.
D’après la même source, les principaux moteurs de cette croissance résident dans l'adoption de plus en plus fréquente des moyens de paiement numérique en Afrique, l'augmentation du commerce intra-africain et l'essor du mobile money qui constituent tous des moyens moins onéreux que les transferts bancaires traditionnels.
Le mobile money a concentré à lui seul 30 % des transferts de fonds transfrontaliers en Afrique durant l’année 2024. Ce canal permet de réduire les frais des utilisateurs à une fourchette comprise entre 1,5 % et 3 % par rapport aux banques traditionnelles (dont les frais peuvent aller au-delà de 7 %). Selon le rapport, ce secteur devrait continuer à augmenter sa part de marché, estimée à une moyenne de 48 % depuis plusieurs années.
Inefficacités systémiques
Selon Oui Capital, des inefficacités systémiques font perdre plusieurs milliards de dollars annuellement aux entreprises et aux consommateurs. En cause, les doubles conversions monétaires et la fragmentation des réglementations qui continuent de siphonner des milliards de dollars de coûts cachés. Selon le rapport, le continent continue d'afficher les coûts de transfert de fonds les plus élevés au monde, avec une moyenne de 7 à 8 %.
Le rapport pointe aussi le fait qu’en matière de paiements transfrontaliers, les canaux informels et les transferts bancaires traditionnels demeurent toujours profondément ancrés dans les habitudes des Africains. Cela s’explique notamment par le manque de confiance, d’incohérences réglementaires ou encore d’infrastructures limitées.
L'innovation numérique pour remodeler les paiements transfrontaliers
Selon Oui Capital, l'innovation numérique contribue à remodeler des paiements transfrontaliers en Afrique. Comme l’indique la croissance des transferts mobile money qui accaparent désormais 30 % des transferts de fonds en Afrique subsaharienne.
La même source indique qu’en 2022, l'Afrique représentait 66 % de la valeur mondiale des transactions d'argent mobile, indiquant une formalisation rapide d'un écosystème monétaire autrefois essentiellement informel.
« Les infrastructures – couches API interopérables, pools de liquidités FX décentralisés et intégrations PAPSS – représentent des opportunités de plus de 10 milliards de dollars », présentent tous un potentiel d'investissement important pour remédier aux inefficacités qui pénalisent les paiements transfrontaliers du continent, selon le rapport.
Le Système panafricain de paiement et de règlement (SPA) est l'une de ces initiatives qui favorisent les règlements en monnaie locale et réduisent la dépendance à la compensation USD/EUR, qui représente actuellement environ 5 milliards de dollars de coûts annuels supplémentaires.
Du côté des cryptomonnaies et les stablecoins, le rapport indique que ces moyens représentent des alternatives prometteuses, réduisant les coûts des transferts de fonds jusqu'à 60 % sur les marchés dotés d'une réglementation claire.
Défis persistants
La société de capital-risque souligne des défis persistants dans le continent, dans la mesure où 55 % des législations africaines autorisent la connaissance électronique des clients (Know Your Customer/KYC), ce qui plombe l'évolutivité des solutions FinTech.
Dans une autre perspective, le rapport de Oui Capital exhorte à aller au-delà des transferts entre particuliers en intégrant des services tels que les prêts et les assurances. « La course aux paiements en Afrique est désormais une question d'échelle. Ceux qui trouveront des solutions en matière de liquidité, de conformité et de coûts définiront l'épine dorsale du commerce numérique du continent au cours de la prochaine décennie », conclut le rapport.