Pénurie de psychotropes en France : un danger pour les patients

La pénurie de médicaments psychotropes s’aggrave en France, menaçant des millions de patients souffrant de troubles psychiques. Quétiapine, sertraline, lithium : les ruptures de stock provoquent des décompensations graves, tandis que les psychiatres alertent sur l’inaction des pouvoirs publics.
Depuis plusieurs mois, la France fait face à une pénurie alarmante de psychotropes, essentiels pour traiter des pathologies comme la schizophrénie, les troubles bipolaires ou la dépression. Des médicaments comme la quétiapine, la sertraline, la venlafaxine, le lithium ou l’olanzapine à libération prolongée sont en rupture ou en stock critique. Cette situation, dénoncée par un collectif de psychiatres dans une tribune publiée le 15 avril dans Le Monde, met en danger environ 20 % des Français souffrant de troubles psychiques.
Psychotropes en tension : l’appel des psychiatres. https://t.co/RQWodglh5H
— Le Quotidien du Pharmacien (@leQPH_fr) April 17, 2025
Les conséquences sont parfois dramatiques. Une rupture de traitement peut entraîner des décompensations aiguës, des souffrances psychiques intenses, voire des suicides – 20 % des patients bipolaires non traités y succombent, selon les experts. Les services psychiatriques, déjà saturés par un manque de lits et de praticiens, sont submergés dans un contexte de crise de l’hôpital en France.
Délocalisation et marché français peu lucratif
Les causes sont multiples. La production, souvent délocalisée, dépend de sites industriels uniques, vulnérables aux aléas. La récente vente de Doliprane aux États-Unis illustre les difficultés du secteur alors que paradoxalement les dépenses de santé augmentent de 5 % par an, selon un rapport de la Drees publié en novembre 2024.
Les laboratoires, jugeant les prix français trop bas, privilégient des marchés plus lucratifs ou abandonnent des molécules anciennes, pourtant efficaces, pour des traitements plus chers. La cariprazine, utilisée contre la schizophrénie à l’étranger, reste indisponible en France faute d’accord sur son prix.
Face à l’inaction des pouvoirs publics, les professionnels tirent la sonnette d’alarme. Malgré la santé mentale érigée en « grande cause nationale 2025 », les mesures restent insuffisantes. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) autorise des préparations magistrales, mais ces alternatives, moins efficaces, ne suffisent pas. Les psychiatres appellent à relocaliser la production, revaloriser les prix des médicaments essentiels et garantir l’accès aux innovations thérapeutiques.
Cette crise révèle un abandon chronique de la psychiatrie, « parent pauvre » de la médecine française, alors que dans le même temps le pays connaît une explosion des séjours en pédopsychiatrie.