20 dignitaires algériens risquent le gel de leurs avoirs en France

Une source gouvernementale française a révélé l’établissement d’une liste comprenant vingt dignitaires algériens dont les avoirs en France pourraient être gelés en cas de nouvelle escalade entre les deux pays sur le modèle des oligarques russes. Il s’agirait d’une décision qui pourrait être prise par les ministres de l’Économie et de l’Intérieur.
Dans un article publié le 28 mai, L’Express révèle l’existence d’une liste de dignitaires algériens susceptibles de voir leurs biens en France gelés si les négociations diplomatiques entre les deux pays échouaient.
L’idée de sanctionner des officiels algériens avait été évoquée pour la première fois en janvier dernier par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau.
Ce dernier avait déclaré, dans un contexte de crise entre l’Algérie et la France, notamment au sujet de l’expulsion des OQTF algériens : « Il peut y avoir des mesures individuelles visant des dignitaires algériens, notamment ceux qui veulent mettre à mal nos relations bilatérales. Des mesures qui peuvent, par exemple, être patrimoniales ».
Une source gouvernementale a confirmé à L’Express que les ministères de l’Économie et de l’Intérieur avaient « sérieusement exploré cette possibilité ». Bercy et Beauvau ont conjointement établi une liste comprenant 20 dignitaires algériens. Il s’agit de hauts responsables administratifs, politiques et sécuritaires en Algérie qui ont un patrimoine ou des intérêts financiers en France.
« On estime que 801 membres de la nomenklatura algérienne ont des intérêts financiers en France et viennent régulièrement dans le pays. Et ce, sans compter les militaires », a révélé la source gouvernementale française à L’Express.
Une arme de dernier recours
Cette liste, comprenant les noms de 20 hauts dignitaires algériens, est envisagée comme une arme à utiliser en dernier recours lors des négociations diplomatiques entre les deux pays. Ces derniers connaissent une crispation sans précédent de leurs relations diplomatiques.
Le dernier épisode en date a été la suspension, le 16 mai, de l’accord de 2007 par le gouvernement français, accord qui permettait aux titulaires de passeports diplomatiques de circuler librement entre les deux pays.
Dans l’hypothèse où Alger prendrait des mesures hostiles à la France, le gouvernement français publierait la liste des « vingt dignitaires », a confié la source à L’Express, en précisant : « Cela se ferait sur le modèle des oligarques russes ».
Quant à la légalité d’une telle mesure, l’avocat spécialisé dans les affaires de gel des avoirs Renaud de l’Aigle a précisé qu’il s’agirait d’une nouvelle disposition du Code monétaire et financier français, l’article L562-1, entré en vigueur le 25 juillet 2024. Cette disposition autorise les ministres de l’Économie et de l’Intérieur à geler les avoirs des personnes qui commettent des « actes d’ingérence ».
Ce terme définit un « agissement commis directement ou indirectement à la demande ou pour le compte d’une puissance étrangère et ayant pour objet ou pour effet […] de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ».
L’avocat précise que si cette décision de gel des avoirs était annoncée, les dignitaires algériens en question ne pourraient plus disposer de leurs biens immobiliers ni utiliser leurs comptes bancaires pour une durée de six mois renouvelables.