En toute discrétion, Beauvau publie ses mauvais chiffres sur la violence
Homicides, viols et agressions connaissent une forte hausse en France en 2019. A l'approche des municipales, l'Intérieur s'abstient de pavoiser et préfère publier ces chiffres en toute discrétion via son service de statistique.
Les élections municipales approchent à grands pas et les chiffres de la délinquance sur le territoire français en 2019 ne sont pas bons. Comme le relève le quotidien Le Figaro, le gouvernement semble avoir estimé préférable de publier ce mauvais bilan sans fanfares ni trompettes via son service de statistique pour éviter un déballage médiatique dommageable. Il n'y aura donc probablement pas de grande conférence de presse sur la lutte contre la délinquance pour Christophe Castaner au mois de janvier 2020.
Il faut préciser que le seul grand chantier sécuritaire qu'on puisse raccrocher au bilan du directeur général de la police nationale bientôt parti en retraite anticipée, Eric Morvan, et à l'ancien ministre de l'Intérieur démissionnaire, Gérard Collomb, est la fameuse Police de sécurité du quotidien et son déploiement dans les Quartiers de reconquête républicaine... Le bilan paraît donc plutôt mitigé pour l'heure.
Le ministère de l'Intérieur a tout de même reconnu dans ce rapport : «Comme en 2018, les coups et blessures volontaires sur personnes de 15 ans ou plus enregistrent une forte hausse en 2019 (+8 %).» Concernant les violences sexuelles, «après une année 2018 marquée au niveau national par une hausse sensible (+19 %), l’année 2019 affiche également une augmentation très nette de ces violences (+12 %).»
C'est le pire bilan qu'on ait vu depuis des années
Par ailleurs, poursuit le rapport statistique : «Toutes les régions françaises ont connu des augmentations du nombre de viols, agressions et harcèlements sexuels enregistrés par les forces de sécurité en 2019, notamment la Corse, le Centre-Val de Loire, l’Auvergne-Rhône-Alpes et la Nouvelle-Aquitaine.»
Pour le criminologue Alain Bauer, interrogé par Le Figaro, «c'est le pire bilan qu'on ait vu depuis des années. [...] Tous les types de violence sont concernés, faisant effectivement craindre un retour à presque quarante années en arrière, en tout cas sur le terrain des homicides et des tentatives d’homicides.»
Les statisticiens précisent encore : «Le nombre d’homicides augmente nettement en 2019 (970 victimes) alors qu’il était stable les deux dernières années.» Ce qui constitue une hausse de 8,5% en seulement une année, selon le journal conservateur, qui y ajoute les «tentatives d'homicides».
De plus «les escroqueries sont en forte progression en 2019 (+11%), alors que la tendance à la hausse était moins marquée en 2018 et 2017», ajoute le rapport. Et si les cambriolages et vols avec armes n'ont ni baissé, ni augmenté sur l'ensemble du territoire, Le Figaro retient tout de même : «Pas à Paris, en tout cas, où les vols avec effractions ont littéralement explosé ces deux dernières années.»
Le dispositif des Quartiers de reconquête républicaine initié par l'ancien ministre de l'Intérieur, repris par Christophe Castaner, Laurent Nunez et le DGPN sur le départ n'a donc pas encore porté ses fruits. Certains policiers, à l'instar du syndicat ViGi-Police avaient d'ailleurs dénoncé en septembre 2019 «un vaste plan de com' [...] rédigé par des technocrates dans des salons feutrés».
Les syndicats majoritaires du secteur policier et les associations de terrain ont plusieurs fois alerté sur un triple phénomène : une trop faible réponse pénale, le manque d'importance accordée au domaine judiciaire en France et un emploi contestable des forces de sécurité intérieure, qui auraient été trop sollicitées pour le maintien de l'ordre et pas assez sur ses missions initiales.
Un policier de terrain affecté en banlieue parisienne, interrogé par RT France, déplorait en mai 2019 : «Comme nous n'occupons plus le terrain, les délinquants ne veulent plus voir un seul flic, ils veulent la place libre et nette et ça donne ce genre d'événements, des collègues caillassés et des cocktails Molotov qui volent sur les véhicules de police.»