Sociétés militaires privées : Moscou rappelle qu'il ne s'agit pas d'un «phénomène russe»
Alors que les actions de sociétés militaires privées russes en Afrique font l'objet de polémiques, le chef de la diplomatie russe a tenu à faire le distinguo entre celles-ci et la politique étrangère menée par son pays.
Moscou n'en finit pas d'être associé par des gouvernements occidentaux aux actions attribuées à des sociétés de sécurité privée russes.
Ce 12 novembre, dans le cadre d'une réunion du Conseil de coopération franco-russe sur les questions de sécurité (CCQS) à Paris, les ministres français des Affaires étrangères (Jean-Yves Le Drian) et des Armées (Florence Parly) ont souligné auprès de leurs homologues russes «le caractère inacceptable que revêtirait le déploiement de mercenaires de Wagner dans la bande sahélo-saharienne». Des propos faisant écho aux craintes exprimées par la France face à la perspective d'un accord entre le gouvernement malien et cette société de sécurité privée russe.
Répondant publiquement à ces propos plus tard dans la soirée, lors d'une conférence de presse, Sergueï Lavrov a souligné que la Russie menait «une coopération technico-militaire officielle» avec Bamako – distincte, donc, des potentiels liens du gouvernement malien avec le secteur de la sécurité privée.
Le chef de la diplomatie russe a également noté à cette occasion que l'activité des entreprises militaires privées n'était «pas du tout un phénomène russe». Au contraire, a-t-il estimé, «ces compagnies privées sont apparues dans les pays occidentaux [...] et l'ampleur de ces compagnies occidentales est bien plus grande que celles des compagnies créées par des citoyens russes».
En tout état de cause, d'autres sociétés privées que Wagner suscitent régulièrement la controverse. En décembre dernier, par exemple, la société américaine BlackWater avait défrayé la chronique après que le président américain Donald Trump eut gracié quatre de ses employés, qui avaient été condamnés à une peine de prison pour avoir massacré 14 civils dont deux enfants à Bagdad (Irak) en 2007.
Confusion entre sociétés privées et Etat
Le soir du 12 novembre également, le président de la République française a établi un lien entre Moscou et le travail de sociétés privées russes, cette fois en Libye : «Un premier pas a été fait en effet avec l'annonce hier [...] du retrait de 300 mercenaires. Mais ce n'est qu'un début : la Turquie, la Russie doivent aussi retirer sans délai leurs mercenaires et leurs forces militaires, dont la présence menace la stabilité et la sécurité du pays et de toute la région», a déclaré Emmanuel Macron, au terme d'une conférence internationale sur la Libye organisée à Paris.
Les «300 mercenaires» dont il était question renvoient à une annonce du 11 novembre faite par le commandement de l'Armée nationale libyenne (ANL), loyale au maréchal Haftar, l'homme fort de l'Est libyen : l'ANL a annoncé avoir «décidé de faire partir un premier groupe de 300 mercenaires et combattants étrangers» à la demande de la France.
Face à ce type d'allégations formulées notamment par la France, les autorités russes sont plusieurs fois montées au créneau ces derniers mois.
Le 21 octobre par exemple, le président russe Vladimir Poutine avait déclaré que les entités militaires privées russes ne «représentent pas les intérêts de l'Etat russe». «Si elles se trouvent quelque part à l'étranger, ce n'est pas sous l'ordre de l'Etat russe. Il s'agit d'un secteur privé et d'intérêts privés, y compris ceux qui sont liés à l'extraction des ressources énergétiques : l'or et les pierres précieuses», avait-il insisté, dans le cadre de la 18e édition du Club Valdaï à Sotchi. Le chef d'Etat avait en outre assuré son pays veillait à ce que les activités de ces entreprises ne compromettent pas les intérêts nationaux russes.