La rencontre de Budapest est annulée, Trump l’a annoncé. Une décision parfaitement logique et en réalité plutôt positive. Les conditions n’étaient pas réunies, mais surtout, pour Alexandre Regnaud, le temps de la paix n’est malheureusement pas encore venu.
« Nous avons annulé la réunion avec le Président Poutine. […] Je ne pensais pas que nous allions parvenir à nos objectifs, alors je l’ai annulée, mais nous la reprogrammerons à l’avenir ». Voici les propos exacts de Trump lors de sa dernière conférence de presse à la Maison blanche. À la place, il annonce que des sanctions supplémentaires vont être prises contre Rosneft et Lukoil, les deux principales compagnies pétrolières russes. En parallèle, il confirme, lors de la même conférence de presse, qu’il n’y aura pas de Tomahawks en Ukraine, et sur son réseau social Truth, que les informations sur l’autorisation des frappes à longue portée sont des « fake news ».
Voici pour les faits, et ils contiennent en eux-mêmes absolument tous les éléments nécessaires à la bonne compréhension de la situation.
Si Trump annule, ne voulant pas « perdre son temps », comme il l'avait dit précédemment, c’est tout simplement parce que la Russie a fait entendre clairement que les conditions posées étaient inacceptables.
Et cela est parfaitement logique, puisque depuis plusieurs jours la même rengaine ne cesse de se faire entendre, celle de la nécessité d’un cessez-le-feu sur la ligne de front actuelle. Une proposition inacceptable pour la Russie, à plusieurs titres.
Tout d’abord parce que Vladimir Poutine a déjà clairement énoncé comme préalable à toute discussion le retrait total des forces ukrainiennes des territoires constitutionnellement russes non encore libérés.
Et surtout parce que le front, dans plusieurs secteurs clés, est sur le point de s’effondrer, avec la chute prévisible à terme de plusieurs verrous urbains majeurs. À Konstantinovka, à Pokrovsk et Myrnograd, vers Orekhov dans la direction de Zaporojié, Lyman, Siversk, Koupiansk, la liste est très longue, de plus en plus longue
même.
Ces pôles urbains sont ce que l’on appelle des verrous stratégiques, des zones en générale fortifiées, derrière lesquels il n’y a… plus rien (ou presque). Ce qui veut dire que cet effort fait, l’avancée russe pourrait être massive et rapide, et mettre l’Ukraine dans une position de capitulation pure en simple, avec, comme il se le répète dans les couloirs, non plus 4, mais 6 régions qui rejoindraient la Fédération de Russie.
On comprend mieux l’empressement occidental à vouloir des cessez-le-feu immédiats, et celui de la Russie à les refuser alors qu’elle gagne ouvertement et que le temps lui apportera à coup sûr une victoire écrasante. Il n’y a que les dirigeants de l’Union européenne qui prennent systématiquement des décisions contre leurs propres intérêts, ce n’est pas le cas des pays normaux, donc de la Russie.
En parlant de l’UE, voici une seconde raison d’annuler la réunion de Budapest. À la suite d’une rencontre des ministres des Affaires étrangères européens à Luxembourg, le ministre Hongrois a déclaré très exactement : « Un grand nombre d’hommes politiques européens feront beaucoup, de fait tout leur possible, pour que
cette rencontre n’ait pas lieu ». D’où les menaces polonaises contre l’avion du président Poutine par exemple.
Par ailleurs, plus grave que ces rodomontades puériles, les Européens étaient en train de s’inviter à la rencontre, avec leur marionnette Zelensky, au prétexte qu’elle aurait lieu sur le sol de l’UE. Ce qui était bien entendu une garantie d’échec systématique, et en effet, une perte de temps. Trump précise donc que la rencontre est reportée, et il y a fort à parier que, quand ce sera le cas, elle aura lieu ailleurs.
D’ailleurs Trump aussi a intérêt à gagner du temps, tout comme la Russie. En effet, les représentants permanent des pays de l’UE viennent d’approuver une décision concernant l’utilisation des avoirs russes gelés pour accorder un prêt à l’Ukraine. Cela devrait être concrétisé cette semaine d’après le journal Politico. Dans l’entre-temps, Bloomberg nous apprend que les États-Unis ont logiquement fait savoir à l’Europe, lors d’une réunion du FMI à Washington la semaine dernière, qu’ils ne se joindraient pas à l’initiative.
Et pour cause, cela serait un vol pur et simple. Une ligne rouge absolue qui aura comme seul résultat une fuite des investissements et capitaux étrangers et une catastrophe économique à terme pour une UE déjà pourtant mal en point. Les États-Unis ont donc logiquement tout intérêt à laisser l’Europe commettre cette erreur et s’affaiblir encore plus, afin d’attirer les investisseurs qui la fuiront sur leur propre sol. Ce qui est par ailleurs pleinement en accord avec la logique de la politique de « tarifs » douaniers de Trump.
Preuve que tout va bien, si l’on peut dire, et que cela se fait en relative intelligence, Trump refuse l’escalade en confirmant qu’il n’y aura pas d’armes à longue portée pour Kiev. Les sanctions contre Lukoil et Rosneft sont, bien entendu, une mauvaise nouvelle pour ces compagnies, mais elles ne sont qu’une compensation de Trump pour ne pas totalement perdre la face. Elles ne feront qui plus est qu’accélérer encore un peu plus les processus de réorientation des marchés et de dédollarisation, comme quasiment toutes les sanctions occidentales depuis le début.
Ce que l’on peut conclure de tout cela, c’est qu’avec cette rencontre, Trump s’est sans doute laissé emporter par son très relatif succès au Moyen-Orient et a voulu aller trop vite. Militairement, économiquement, le temps de la paix n’est pas encore venu, alors que les paramètres évoluent rapidement.
Face à une junte ukrainienne et à un état profond européen qui, la main dans la main, refusent la paix et attisent les tensions, il faut malheureusement encore sacrifier des vies et les laisser s’autodétruire, pour qu’en position d’extrême faiblesse, ils soient acculés et se laissent imposer une véritable paix, durable.
C’est en parallèle le meilleur moyen de faire d’une pierre deux coups, à la fois pour la Russie en remplissant les objectifs initiaux de son opération spéciale, et pour les Etats-Unis en atteignant leur objectif de réindustrialisation.
Cela veut dire la chute militaire de l’Ukraine, et la chute économique de l’Union Européenne.
Les deux sont en bonne voie, et ne sont au final, encore et toujours qu’une question… de temps.
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