Ce qui est très intéressant dans le phénomène Trump, c’est que le candidat républicain marque des points autant par ses propositions iconoclastes que par la détestation dont il fait l’objet de la part de toutes les élites confondues.
Le magazine que je dirige a eu la chance et l’honneur d’être celui par lequel Donald Trump a choisi de parler à destination des Français, mais aussi de l’ensemble des Européens, voire du reste du monde. Notre grand reporter, André Bercoff a eu l’immense privilège de passer plus de trois jours à ses côtés. Aussi bien dans sa famille et dans son célèbre penthouse de la Trump Tower qui domine Central Park à New York que dans des meetings où le tycoon américain arrive comme une pop-star sortant d’un Boeing sur lequel sont peintes, en énorme, les cinq lettres TRUMP. Et l’image qui ressort de celui qui fait aujourd’hui la course en tête chez les Républicains pour la prochaine élection présidentielle américaine est très différente de celle que les médias français ou européens se plaisent à donner de lui.
Donald Trump a le courage de «renverser la table» et de ne pas s’en tenir au conformisme
Bien sûr Trump provoque lorsqu’il parle de construire un mur entre les Etats-Unis et le Mexique afin d’arrêter l’immigration clandestine. Bien sûr Trump choque lorsqu’il dit vouloir interdire pendant un certain laps de temps l’entrée des musulmans sur le territoire américain. Bien sûr Trump agace beaucoup de monde lorsqu’il plaide pour le port d’armes au moment même où Barack Obama verse une larme à l’œil en évoquant le lobby des armuriers qui l’empêche de toucher à cette sacro-sainte liberté individuelle. Tous ces sujets sont considérés comme populistes à Washington ou bien par l’intelligentsia new-yorkaise qui est préservée de l’insécurité. Mais Donald Trump a fait la démonstration par A + B que ces sujets sont populaires.
Ce phénomène nous concerne tous parce qu’il se passe également en Europe
Il sont populaires parce qu’ils préoccupent les Américains du Texas comme du New Hampshire : toutes ces classes populaires et moyennes qui ont le sentiment d’être les oubliés de la mondialisation. Ils sont populaires parce que ces sujets sont tabous chez les autres candidats et parce que Donald Trump a le courage de «renverser la table» et de ne pas s’en tenir au conformisme des discours politiques que l’on pratique au Congrès. Ils sont populaires aussi et presque surtout parce qu’ils sont systématiquement dénoncés par ceux qui incarnent la bien-pensance ou la pensée unique. C’est-à-dire, les éditorialistes du New York Times, la très select National Review, journal de l’élite de la cote est, et les grands réseaux de télévision hertzienne, y compris Fox News.
Ce qui est très intéressant dans le phénomène Trump, et d’ailleurs aussi dans son miroir démocrate qu’est Bernie Sanders, c’est qu’ils marquent des points autant par leurs propositions iconoclastes que par la détestation dont ils font l’objet de la part de l’élite intellectuelle, académique, économique ou politique. Et ce phénomène nous concerne tous parce qu’il se passe également en Europe. Si Jeremy Corbyn est devenu, contre toute attente, le patron du parti travailliste en Grande-Bretagne, c’est tout simplement parce que Tony Blair, qui incarne l’élite et l’establishment a appelé les Anglais à ne pas voter pour lui. Idem en Espagne avec l’émergence de Podemos. Ou en France avec la percée du Front National qui est aujourd’hui le seul parti assuré de participer au second tour de la présidentielle de 2017, en dépit du fameux «front républicain».
Enfin dans le phénomène Trump, il y a un élément très important, c’est que ce candidat a tout misé sur le contact direct avec les électeurs. A la différence de ses concurrents, il ne lève pas de fonds de manière à rester indépendant et «chimiquement pur», et il peut d’autant plus se le permettre que ses 10 milliards de dollars de fortune personnelle lui permettent de financer sa campagne seul. Surtout il a choisi de parler directement à chaque américain via les réseaux sociaux où il est suivi par plus de 12 millions d’américains. Il est le seul à jouer la carte de la désintermédiation de la vie politique. Quand ses concurrents jugent utiles de donner des interviews aux grands quotidiens et aux chaines de télévision, lui préfère s’adresser directement à chaque électeur. Le seul fait de ne pas participer à un débat et d’organiser un meeting payant dont les recettes ont été reversées aux vétérans d’Irak, lui a fait gagner 3 à 4 points dans tous les sondages.
Le monde politique outre-Atlantique ne pourra plus fonctionner après cette élection, comme il a fonctionné jusqu’ici
Tout cela ne veut pas dire que Donald Trump est aujourd’hui assuré d’être désigné par la convention républicaine. On ne le saura qu’après le vote du «super-Tuesday» au début du mois de mars. Tout cela ne veut pas dire que Trump, même s’il est investi par les républicains, pourra gagner contre le candidat démocrate en novembre prochain. Mais quoiqu’il arrive le monde politique outre-Atlantique ne pourra plus fonctionner après cette élection, comme il a fonctionné jusqu’ici. Il ne pourra plus refermer le couvercle sur les sujets jugés «politiquement incorrects» que Donald Trump a soulevés. Il ne pourra pas faire abstraction de ce gigantesque coup de pied dans la fourmilière.
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