Le Hezbollah tente de se repositionner en Turquie, sous l'œil inquiet de Tel Aviv

La présence d’Ammar Moussaoui en Turquie illustre une médiation croissante d’Ankara entre le Hezbollah et Damas. La Turquie profite de l’affaiblissement iranien pour renforcer son rôle en Syrie et dans le dossier régional, au détriment de Téhéran. Israël tente de contrer ces rapprochements en freinant toute coordination turco-irano-arabe.

La récente participation d’Ammar Moussaoui, responsable des relations extérieures du Hezbollah, à une conférence sur la Palestine à Istanbul confirme l’intensification des contacts entre le parti chiite et Ankara. Cette dynamique s’inscrit dans une série de visites et de rencontres, révélant un rôle croissant de la Turquie comme médiatrice entre le Hezbollah et la nouvelle direction syrienne.

Alors que l’Iran et la Turquie demeurent des rivaux régionaux, ils n’ont cessé de maintenir des canaux de coordination, notamment via le processus d’Astana. La chute du gouvernement Assad un an plus tôt a rebattu les cartes, renforçant la position turque face à un Iran affaibli par des revers militaires et diplomatiques.

Israël joue la carte de la division

En Syrie, théâtre d’une compétition historique entre Ankara et Téhéran, l’avancée des forces d’Ahmed al-Chareh a donné à la Turquie un levier inédit dans ses négociations avec la Russie et l’Iran. Forte de ses gains en Syrie et de son activisme dans le dossier de Gaza, Ankara tente désormais de façonner un équilibre régional qui limite l’influence iranienne et stabilise la Syrie.

Elle transmet ainsi des messages entre Damas, le Hezbollah et Téhéran, cherchant à empêcher toute action qui pourrait profiter à Israël ou remettre en cause l’autorité du nouveau président syrien. La Turquie souhaite en particulier contenir la présence du Hezbollah dans les zones sensibles de Syrie et garantir qu’aucune menace ne pèse sur le nouveau pouvoir syrien.

Face à cette recomposition, Israël multiplie initiatives et fuites médiatiques pour entraver les rapprochements entre la Turquie, l'Iran et les pays arabes. Tel Aviv entend imposer une logique d’alliances régionales fondée sur la fragmentation et aspire à dominer les routes énergétiques de la Méditerranée orientale.

Il cherche à s’imposer comme plateforme principale d’exportation du gaz vers l’Europe, en concurrence directe avec Ankara. Cette stratégie inclut aussi une tentative d’intégrer l’accord de délimitation maritime entre le Liban et Chypre pour couper la route à la Turquie.

Parallèlement, Israël veut orienter ses discussions avec le Liban vers des dossiers économiques tels que l'agriculture, le commerce ou les hydrocarbures, afin de détacher Beyrouth de la Syrie et d’empêcher Ankara d’étendre son influence au sud-Liban.

Dans cette guerre d’influence, les enjeux énergétiques, logistiques et géopolitiques se mêlent à une bataille pour le leadership régional, tandis que les acteurs locaux et internationaux cherchent à redessiner les équilibres du Proche-Orient post-Assad.