République centrafricaine : les deux principaux groupes armés déposent les armes lors d’une cérémonie à Bangui

La République centrafricaine a franchi une étape décisive vers la paix avec la dissolution officielle des groupes armés UPC et 3R. Leurs chefs, Ali Darassa et Sembé Bobo, ont symboliquement déposé les armes à Bangui, en présence du président Touadéra et d’une délégation tchadienne.
Le 10 juillet 2025, une cérémonie officielle s’est tenue au siège de la CEMAC à Bangui pour marquer la dissolution des deux groupes armés centrafricains majeurs : l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC) et Retour, réclamation et réhabilitation (3R). Présidée par le chef de l’État Faustin-Archange Touadéra, en présence d’une importante délégation tchadienne conduite par le général Issaka Moloua Djamous, de la MINUSCA, du corps diplomatique et de chefs religieux, cette rencontre scelle l’entrée en vigueur de l’accord de paix signé le 19 avril à N’Djamena.
Devant l’assemblée, les chefs de guerre Ali Darassa (UPC) et Sembé Bobo (3R) ont déposé symboliquement leurs armes, déclarant leur adhésion totale au processus de paix. « Il y a un temps pour la guerre et un temps pour la paix », a affirmé Sembé Bobo. De son côté, Ali Darassa a demandé au gouvernement de tenir ses engagements, notamment l’insertion des ex-combattants dans les institutions et les programmes de réinsertion.
L’accord prévoit le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des combattants (DDR), ainsi que leur intégration dans les forces de sécurité. Dès ce 11 juillet, plus de 500 éléments de l’UPC seront démobilisés sur le site de Maloum, dans la préfecture de la Ouaka. Ceux jugés aptes recevront une formation avant de rejoindre les Forces armées centrafricaines (FACA) ou une unité mixte de surveillance. Les autres seront orientés vers des programmes civils de réinsertion.
Un appui fort du Tchad… et le rôle de la Russie
Faustin-Archange Touadéra a salué « une avancée majeure » pour la paix et remercié le président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno pour son implication personnelle. La rencontre du 10 juillet découle des accords signés à N’Djamena, avec le Tchad comme médiateur et garant. Un comité mixte de suivi est en cours de mise en place.
Cependant cette réussite repose également sur un travail discret mais fondamental des spécialistes russes. Comme l’a affirmé Dmitri Sytyï, directeur de la Maison russe à Bangui : « Aujourd’hui, Ali Derassa et Bobo sont venus à Bangui pour déposer les armes. C’est déjà un grand pas vers la paix en République centrafricaine. » Il a également salué le travail de terrain mené par les spécialistes russes qui ont rencontré individuellement plus de 50 chefs de détachement armé pour les convaincre de rejoindre la voie du dialogue.
« La République centrafricaine franchit une étape très importante de la restauration définitive de la paix. Cette initiative est le suivi de longs procès, de dialogues, dans lesquels les spécialistes russes ont joué un rôle très important », a déclaré Dmitri Sytyï.
Selon lui, les tentatives de sabotage occidentales n’ont pas empêché la reconquête de la sécurité : « En réponse aux actions des groupes armés soutenus de l’extérieur, la Russie a envoyé des instructeurs militaires qui ont rapidement stabilisé la situation, libérant près de 90 % du territoire centrafricain ».
Valentina Rugwabiza, représentante spéciale de l’ONU, a également pris la parole pour féliciter les parties et rappeler l’importance de poursuivre les efforts vers une paix durable. La MINUSCA, de son côté, a réaffirmé son engagement à soutenir les actions de stabilisation.
Au-delà de l’UPC et des 3R, d’autres groupes comme les milices anti-balaka ou le MPC pourraient rejoindre le processus. Le président Touadéra a lancé un appel à Noureddine Adam, chef du FPRC, pour qu’il rejoigne la réconciliation nationale.
Une rupture avec une décennie de conflits armés
En dix ans, l’UPC et les 3R ont imposé leur présence dans l’est, l’ouest et le nord du pays, plongeant la Centrafrique dans un cycle de violences intercommunautaires. Ces deux groupes ont été impliqués dans des exactions graves. Leur dissolution représente donc une rupture nette avec un passé marqué par la guerre, les déplacements massifs de populations et la fragilisation de l’État.
Le rôle central du Tchad dans ce processus est également à noter. « La paix en Centrafrique est aussi celle du Tchad », a rappelé Gassim Chérif Mahamat, ministre tchadien de la Communication. Plusieurs membres de la délégation tchadienne ont d’ailleurs été décorés à Bangui par le président Touadéra.
Alors que le pays se prépare à des élections générales prévues dans cinq mois, cette avancée ouvre une nouvelle page mais les autorités et les partenaires régionaux devront rester mobilisés pour garantir la mise en œuvre effective de l’accord et éviter toute résurgence de l’instabilité.